Entretien avec Ira van Eelen

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Ira van Eelen, fille du chercheur néerlandais Willem van Eelen,  poursuit le dessein de son père, précurseur en matière de recherches sur la viande cellulaire et inventeur de la viande cultivée. Il a passé 40 ans de sa vie a étudié cette opportunité.

Lucide sur la croissance de la population en augmentation constante, provoquant dans la foulée une croissance alarmante de la demande de viande, et donc une pression affolante sur les ressources et les animaux, il savait qu’un jour, cette demande arriverait à saturation et que cette consommation animalière ne possédait aucune éthique.

À son décès, Ira van Eelen croyait devoir classer à contrecœur les recherches de son père et fermer le livre... Mais le coup de fil de Josh Tetrick, PDG de JUST, a rapidement relancé la machine… pour écrire la suite.

Aujourd’hui co-fondatrice de Kind Earth Tech KET, Ira van Eelen est aussi conseillère de l'entreprise de fabrication d'aliments JUST, consultante de la Cellular Agriculture Society (CAS) et PDG de Cultured Meat Farm.

 

Bonjour Ira. Merci de nous avoir accordé cette interview. 

Pouvez-vous présenter "JUST" ? Quelle est cette entreprise et en quoi se distingue-t-elle de ses concurrents ?

La raison pour laquelle je suis un grand fan de JUST est que la société a été fondée avec l'idée d'avoir un impact important sur la plus grande industrie du monde... l'industrie alimentaire. Il faut plus de respect pour la planète et les animaux. JUST travaille sur des alternatives végétales comme JUSTegg mais aussi sur de la viande cultivée comme GoodMeat actuellement servie à Singapour.

 

Quels sont, selon vous, les principaux défis à relever pour la viande cultivée ?

Auparavant, le principal défi était d'ordre scientifique afin d’augmenter la production. Aujourd'hui, l'industrie doit faire face à un défi juridique pour entrer sur le marché.

Je suis convaincue que ces deux défis seront relevés, car les avantages de la viande cultivée sont évidents.

 

Vous êtes également cofondateur de KINDEARTH.TECH et de RESPECTfarms. Quels sont les objectifs de ces organisations ?

Avec mon amie Olivia Fox Cabane, nous voulons ouvrir les esprits et être une plateforme pour les technologies "amicales" qui nous aident à mieux agir dans les domaines de l'alimentation, de la mode, des déchets et des soins de santé.

Avec l'innovateur Ralf Becks et l'agriculteur durable Ruud Zanders, nous voulons construire la première ferme de viande de culture aux Pays-Bas. Nous voulons montrer comment la production décentralisée de viande de culture à petite échelle peut constituer un modèle économique pour les petits agriculteurs.  La viande de culture n'a jamais été conçue comme une alternative à l'élevage mais comme une alternative aux pratiques non durables de l'agriculture.

 

Quelle est la position des consommateurs à l'égard de l'agriculture cellulaire en Europe ?

On ne sait pas exactement. Il y a beaucoup d'hypothèses et de spéculations à ce sujet, mais nous ne savons pas vraiment car il n'y a pas encore de produit sur le marché. Je m'attends à ce que ce soit positif une fois que ce sera sur le marché. Le goût familier, les valeurs nutritionnelles positives et les avantages globaux pour notre planète et les animaux sont des éléments que les futurs consommateurs comprendront et adopteront. J'appelle cela "une évidence".

 

Quand les consommateurs pourront-ils acheter de tels produits dans les supermarchés en
Europe?

Nous ne le savons pas pour l'instant, nous ne pouvons que spéculer à ce sujet. Hypothétiquement, selon la législation européenne, ce produit pourrait se retrouver dans les supermarchés dans trois ans si une entreprise déposait aujourd'hui une demande d'autorisation de mise sur le marché d'aliments nouveaux.

 

Comment le public européen perçoit-il la viande cultivée ?

L'attitude à l'égard de la viande de culture varie d'un pays à l'autre en Europe, en fonction de la manière dont les médias locaux présentent la question.

Pour beaucoup, il est considéré comme une solution, d'autres peuvent le voir comme une menace.

Des recherches ont montré qu'une meilleure compréhension de l'agriculture cellulaire rend l'attitude des gens plus positive. La communication est essentielle.

 

Avez-vous remarqué un changement/une évolution des attitudes au cours des deux dernières années ?

Je ne sais pas si je peux appeler cela un changement d'attitude, mais il y a de nombreux avantages, comme la prévention des pandémies et la sécurité de la production locale, dont je ne pouvais pas parler auparavant. Aujourd'hui, les gens sont ouverts à ces questions.

 

Quel conseil donneriez-vous aux décideurs politiques ?

Pensez dès à présent à CellAg / l'agriculture cellulaire lorsque vous travaillez sur les transitions de demain. CellAg en a peut-être encore pour quelques années, mais pas des décennies.  Si nous n'en tenons pas compte aujourd'hui, nous passerons à côté des solutions dont nous avons besoin pour atteindre les objectifs que les responsables politiques se sont engagés à atteindre.

 

Que pensez-vous de l'initiative de GAIA et d'Eurogroup d'organiser un symposium ?

Cette initiative n'a pas de prix, et je suis honorée d'en faire partie. GAIA continue de défendre le véritable potentiel de l'agriculture cellulaire et est un leader en Europe dans l'éducation du public et des politiciens sur ce à quoi nous voulons que notre avenir ressemble. Ils sont un pont entre le public, les sans-voix et les politiciens.

 

Liens utiles :

https://www.cellag.org/

https://www.ju.st/

https://www.goodmeat.co/