La Viande Cultivée

La viande cultivée

Qu’est-ce que la viande cultivée ?

La viande cultivée, également appelée “viande de culture”, est une viande produite à partir de cellules animales que l’on fait croître ex-vivo, c’est-à-dire en dehors du corps de l’animal. Ce procédé, appelé “culture cellulaire”, se produit dans des cuves similaires à celles utilisées pour la fermentation traditionnelle de la bière et du yaourt.

Bien que sa production ne nécessite aucun abattage d’animaux, la viande cultivée n’en est pas moins de la viande véritable. Au niveau moléculaire, rien ne distingue la chair cultivée de poulet, de bœuf ou de porc de la viande traditionnelle.

La viande cultivée est le fruit d’un mode de production alternatif appelé “agriculture cellulaire”. Outre la viande, l’agriculture cellulaire vise à produire de la chair de poisson, du lait, des œufs, du foie gras et du cuir à partir de cellules ou de micro-organismes en culture. Elle permet donc d’éliminer à la fois les problèmes de bien-être animal et les effets négatifs sur l’environnement inhérents aux méthodes de production animale actuelles.

Pourquoi
avons-nous besoin
de viande cultivée ?

  • Pour Les Animaux

    Chaque année, près de 70 milliards d’animaux terrestres sont abattus dans le monde pour la consommation – c’est presque 10 fois la population humaine mondiale. L’écrasante majorité des animaux de rente sont issus de l’élevage intensif, qui leur impose des conditions de vie extrêmement pénibles : entassement dans des bâtiments clos, mutilations, séparation des mères et de leurs petits, etc.

    La FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) annonce une augmentation de la consommation de viande mondiale d’environ 70% d’ici 2050, ce qui signifie que le nombre d’animaux élevés et tués pour la consommation ne fera que croître au cours des prochaines décennies.

  • Pour la planète

    L’élevage est une des causes majeures du réchauffement climatique. Selon la FAO, 14,5% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde sont imputables à l’élevage. C’est plus que les émissions directes du secteur des transports (14%).

    L’élevage figure parmi les premières causes de la déforestation. L’association Greenpeace estime que l’élevage bovin est responsable à hauteur de 80% de la destruction de la forêt amazonienne. Une analyse sur l’impact environnemental de l’élevage publiée en juin 2018 dans la revue Science révèle que le bétail, qui ne fournit que 18% de nos calories et 37% de nos protéines, accapare 83% des terres cultivables mondiales. La destruction des zones sauvages par l’élevage fait de celui-ci un contributeur majeure à la perte de la biodiversité.

  • Pour notre santé

    Grippes, listeria monocytogenes, salmonelles, campylobacters, E. coli… En entassant les animaux dans des bâtiments clos, l’élevage favorise le développement de bactéries, virus et parasites.

    L’utilisation massive d’antibiotiques pour l’élevage favorise l’apparition de souches bactériennes de plus en plus résistantes aux antibiotiques. L’OMS (Organisation mondiale de la Santé) et la FAO estiment que l’antibio-résistance menace gravement la santé humaine.

Comment fabrique-t-on
de la viande cultivée ?

1. Prélèvement de cellules (sous anesthésie)

Pour produire de la viande cultivée, il faut tout d’abord disposer d’une toute petite quantité de cellules animales. Si l’on souhaite produire, par exemple, de la viande de boeuf, un échantillon de cellules provenant d’une vache vivante est nécessaire. La biopsie, pas plus grande qu’une graine de sésame, est réalisée sous anesthésie locale afin que l’animal ne souffre pas. Objectif : faire se développer les cellules en dehors de l’animal.

2. Pourquoi des cellules souches ?

Plusieurs start-ups ont décidé de concentrer leurs efforts sur les cellules souches en raison de leur la capacité à proliférer rapidement. Comme la viande est surtout composée de muscle, de collagène et de gras, ce sont les cellules souches à l’origine de ces tissus qui sont au centre de leur attention. Par souci de clarté, nous nous focaliserons ici sur la production de fibres musculaires.

3. Solution nutritive

Le bioréacteur est rempli d’une solution nutritive qui fournit aux cellules tous les ingrédients nécessaires à leur croissance : eau, sucre, acides aminés, lipides, vitamines, minéraux, etc. À l’heure actuelle, les chercheurs développent des formules ne contenant aucun produit d’origine animale afin que la production de viande cultivée soit totalement dissociée de l’élevage d’animaux.

4. Prolifération dans le bioréacteur

Une fois le prélèvement réalisé, les cellules sont placées dans une sorte de cuve géante, appelée bioréacteur. Ce dispositif a pour fonction de simuler les conditions à l’intérieur du corps de l’animal, permettant aux cellules de proliférer naturellement. Sans qu’il n’y ait d’ailleurs aucune modification génétique. À l’intérieur du bioréacteur, le taux d’oxygène, le pH, la pression hydrostatique et la température sont minutieusement contrôlés afin d’optimiser la prolifération cellulaire. Le bioréacteur est rempli d’une solution nutritive décrite au point 3.

5. Croissance des tissus musculaires

Après avoir obtenu par culture plusieurs milliers de milliards de cellules souches, on provoque en elles le processus de différenciation, c’est-à-dire qu’on les incite à se spécialiser en cellules musculaires. Pendant cette phase, les cellules cessent de proliférer et fusionnent les unes avec les autres pour former des fibres musculaires.

Parce que la viande, qu’elle soit hachée ou en morceau, possède une texture et une forme particulière, la différenciation cellulaire doit être guidée par un “échafaudage” auquel les cellules peuvent adhérer. Sans ce support, les cellules présentes dans la culture s’agglutineraient les unes contre les autres pour former une bouillie peu ragoutante. Plusieurs types d’échafaudage sont en cours d’études : micro-billes biodégradables, structure poreuse en 3 dimensions permettant la circulation des nutriments à travers les tissus, hydrogel comestible faisant partie intégrante du produit final, etc.

6. Conditionnement

Lorsque tous les faisceaux sont regroupés, on obtient de la viande qui peut ensuite être transformée comme le produit d’origine.

La viande cultivée est de la viande véritable. Une vraie viande n’impliquant aucun abattage d’animaux. Au goût, elle ne se distingue en rien de la viande de boeuf, de porc ou de poulet conventionnelle. Par ailleurs, elle se cuisine de la même manière.

QUAND LA VIANDE CULTIVÉE SERA-T-ELLE COMMERCIALISÉE ?

Si une production à l’échelle expérimentale est désormais relativement facile, une production à grande échelle – et à un coût compétitif – demeure un véritable défi technique. Par exemple, les chercheurs doivent encore développer des bioréacteurs dont le volume serait de l’ordre de plusieurs milliers de litres (à titre de comparaison, les bioréacteurs utilisés en médecine régénérative ne font généralement que quelques litres). Ils doivent également optimiser des solutions nutritives bon marché qui pourront se substituer au sérum de veau fœtal (SVF), clairement incompatible avec le respect du bien-être animal.

Malgré les difficultés techniques auxquelles font face les biologistes et ingénieurs à l’heure actuelle, les entreprises du secteur restent optimistes et continuent d’annoncer des dates de commercialisation relativement proches. Par exemple, le néerlandais Mosa Meat et l’états-unien Memphis Meats s’accordent pour dire que leurs premiers produits arriveront sur le marché dès 2021. D’abord vendus à petite échelle, ils devraient être disponibles dans la grande distribution d’ici 2025.

En attendant, et maintenant que vous êtes mieux informé sur les conséquences de l’élevage pour les animaux et pour l’environnement, n’hésitez pas à modifier votre manière de consommer. On pense par exemple au végétarisme, au végétalisme ou au véganisme.

Illustration of a cow

QUI PARTICIPE 
AU DÉVELOPPEMENT ET À LA PROMOTION DE LA VIANDE CULTIVÉE ?

Plusieurs entreprises à travers le monde œuvrent au développement de la viande de culture et à sa commercialisation.

Des organismes sans but lucratif, dont les préoccupations vont de la sauvegarde de l’environnement à la question du bien-être animal, contribuent à l’essor de l’agriculture cellulaire par un travail de promotion et de récolte de fonds.

Ce marché émergent attire désormais de nombreux investisseurs, dont le cofondateur de Microsoft, Bill Gates, le fondateur du groupe Virgin, Richard Branson, et le cofondateur de Google, Sergey Brin. Le secteur est devenu si prometteur que certains géants de l’agroalimentaire ont déjà investi des sommes considérables dans celui-ci. C’est le cas de Tyson Foods, Cargill, et Bell.

"Je crois que dans une trentaine d’années, nous n’aurons plus besoin de tuer d’animaux et que toute la viande sera soit cultivée, soit végétale, qu’elle aura le même goût et qu’elle sera aussi beaucoup plus saine pour tous. Un jour, lorsque nous songerons au passé, nous jugerons archaïque le fait que nos grand-parents tuaient des animaux pour se nourrir."

Richard Branson
Entrepreneur britannique, fondateur de la marque Virgin Group